C’est ainsi que commence un séjour de deux semaines à l’hôpital marqué par une douleur croissante (et des doses croissantes de narcotiques pour la contrôler), une faiblesse extrême et une constipation causée par les narcotiques. Richard pensait qu’il était inutile de poursuivre le traitement ; il n’irait jamais mieux et ne sortirait pas vivant de l’hôpital. Ses médecins pensaient le contraire et l’ont incité à poursuivre la radiothérapie, ainsi que les médicaments pour contrer l’enflure et la constipation.
Mon objectif, mon espoir, était qu’il vive seulement trois semaines de plus et qu’il soit suffisamment bien le 26 mars pour assister à une célébration musicale de l’œuvre de sa vie de parolier, au cours de laquelle les amis et la famille venus de loin pourraient lui dire au revoir.
Le sixième matin de son hospitalisation, sa congestion intestinale enfin soulagée, il s’est réveillé sans douleur et de bonne humeur et a annoncé, en plaisantant à moitié : « Aujourd’hui, j’ai presque envie de vivre. » J’ai recommencé à respirer normalement, notamment grâce aux infirmières et aux infirmières techniciennes en oncologie, compétentes et consciencieuses, dont le comportement enjoué semblait capable d’inspirer une volonté de vivre à un cadavre.
Un dernier voyage
Mais ce ne devait être qu’un bref sursis. Après deux semaines de radiothérapie, il est devenu évident que les traitements ne faisaient qu’ajouter à sa misère, sans la soulager – chaque contact, chaque mouvement semblait lui faire mal – et il n’était plus capable de sortir du lit. Encouragé par mes fils et leurs épouses, qui ne voyaient pas l’intérêt de prolonger son agonie, j’ai abandonné à contrecœur mon objectif du 26 mars et j’ai pris des dispositions pour qu’il reçoive des soins palliatifs.
Francine Russo l’exprime succinctement dans son excellent nouveau livre, « They’re Your Parents, Too ! » (Bantam, 2010) : « Le véritable défi dans la prise de décision concernant le traitement de prolongation de la vie est de savoir dans quelle mesure nous pouvons nous concentrer sur ce dont notre parent mourant a besoin plutôt que sur notre propre angoisse. C’est le test ultime de la séparation émotionnelle. »
Et donc le lendemain, je suis montée dans l’ambulance avec mon mari pour son transfert à l’hôpital Calvary, un hospice charmant et paisible dont le campus de Brooklyn est au Lutheran Medical Center. Le médecin de l’hospice a passé en revue ses médicaments contre la douleur et a immédiatement suggéré de passer à une perfusion continue de morphine, ce qui a grandement soulagé son inconfort et mon angoisse de le voir souffrir. Plus rien à craindre, plus de décisions à prendre.
Trois jours plus tard, il était évident pour tous que la fin était proche. Il avait cessé de manger, ne prononçait plus un mot et dormait presque tout le temps. Sachant que l’ouïe est le dernier sens à disparaître, nous avons continué à lui parler, à lui dire combien nous l’aimions, à lire les nombreuses lettres et messages électroniques incroyables envoyés par la famille et les amis, et à lui souhaiter une fin paisible.
Richard Engquist, le mari de Jane Brody, est décédé le 18 mars.